Cendrillon mon amour

À deux doigts de la catatonie schizophrénique en raison de son mariage raté et du décès brutal de sa femme, le reporter Ted Lindsay suit à la lettre les conseils de son psychanalyste et quitte la petite ville de Louisville pour refaire sa vie à New York. Il trouve une chambre et un emploi dans un restaurant de quartier, peste contre la monotonie de l’existence, s’affole dans des bras brûlants, découvre la fille de ses rêves et ne tarde pas à se retrouver mêlé à une dangereuse affaire d’escroquerie. Chasseurs et chassés, criminels et assassins, Ted et sa belle Cinderella s’embarquent dans un drôle de conte de fées… « Il est ironique de se construire une vie honorable en partant du mal et du péché. Ce n’est pas seulement ironique, c’est impossible. Ce genre de choses n’arrive pas, tout simplement. Sauf peut-être dans la fiction. Mais quoi ? Comme si la réalité ne dépassait pas la fiction ? » Lawrence Block est un écrivain insatiable et audacieux, dont le maniement de l’ironie s’avère parfois tellement jubilatoire qu’il parvient à décontenancer ses lecteurs les plus avertis. Initialement publié en 1958 (et ce sous pseudonyme), ce délicieux conte immoral est certainement l’une de ses œuvres les plus réussies. Avec son cynisme digne d’un Donald Westlake au mieux de sa forme, Cendrillon, mon amour dégage un entêtant parfum de comédie. Une seule question subsiste, obsédante : pourquoi avoir dissimulé un tel chef-d’œuvre aussi longtemps ? C’est l’histoire d’un journaliste minable du “Louisville Times”, alcoolique et déprimé parce que sa femme l’a plaqué, qui, sur les conseils de son psy, s’en va à New York tenter de refaire sa vie et se retrouve après quelques péripéties dans le Vermont rédacteur en chef d’un journal prospère, marié à une femme superbe et plein de confiance dans un avenir radieux. On peut aussi résumer le conte de fées d’une autre manière : c’est l’histoire d’un type naïf qui découvre que l’honnêteté ne paie pas et qui, après avoir détourné à son profit un trafic de fausse monnaie, assassiné de sa main quatre personnes et épousé une meurtrière, se retrouve dans la peau d’un notable prospère et respecté. … Le roman date donc des débuts de Lawrence Block, quand celui-ci faisait ses gammes entre porno soft et nouvelles policières. Mais il est déjà marqué par ce mélange d’humour et d’inventivité qui est la marque de celui qui est devenu entre temps un des maîtres du roman policier américain. Jeté par sa femme, la belle Mona, Ted Lindsay, reporter au Louisville Times, est si déboussolé qu’il décide de consulter un psy. Plein de bonnes idées, celui-ci lui suggère d’opérer une coupure radicale avec son passé. Plutôt que de sombrer, Lindsay obéit et prend le train pour New York où il finit par retrouver un boulot (et quel boulot !) et emménager dans la 73e Ouest. Tout se passe si bien qu’il finit par oublier sa femme et qu’un jour une autre arrive. Superbe, jeune, bref : la huitième merveille du monde. Et ce qui devait arriver arrive : Ted se retrouve dans un pétrin auprès duquel son chagrin d’antan n’était rien. Commentaire: tranches jaunies, intérieur frais. La vente de ce livre permet de financer la plantation d’arbres en France 🙂