Existence

Y a-t-il de bonnes raisons de détester Jean-Jacques Carton-Mercier, figure de proue de l’Existence selon Eric Reinhardt ? Assurément, oui. Car les vilains traits de caractères, ce personnage les accumule. Cadre sup’ d’une quarantaine d’années aussi misanthrope que sûr de lui, Jean-Jacques Carton-Mercier est également un détestable père de famille, qui se comporte en tyran domestique à la maison. Névrosé obsessionnel diplômé d’une grande école, inconditionnel de l’œuvre du logisticien Ludwig Wittgenstein, ce winner contemporain éprouve un agaçant sentiment de supériorité qu’il est bien sûr incapable de remettre en question. Bref, rien n’a jamais résisté à Jean-Jacques, rien n’a jamais posé problème à cet homme pétri de certitudes. Mais comme la vie, ou plutôt l’existence, n’est pas une ligne droite (et comme dans un roman il y a toujours des accidents), voici ce qui un jour lui arrive : il a le tort d’aller s’acheter un Bounty dans une boulangerie. Et là, tout bascule : les catastrophes s’enchaînent, les Autres ne sont plus soumis, l’identité vacille, les humiliations pleuvent, la ligne de vie éclate en mille directions contradictoires, en mille impasses… Fini la logique formelle, voilà venu le temps du désordre existentiel, voilà venu le temps de la détresse et de l’épreuve de la réalité, voilà advenue la pire journée de la vie de Jean-Jacques Carton-Mercier. La morale de ce portrait satirique d’un rejeton de la société conservatrice ? L’essence de l’existence, c’est bien la précarité… Diplômé d’une école prestigieuse, obsédé de logique et fanatique de l’œuvre de Wittgenstein, Jean-Jacques Carton-Mercier est devenu à près de quarante ans un cadre supérieur détestable qui méprise ses contemporains. Égocentrique et conformiste, il se comporte en véritable tyran domestique avec son épouse et ses deux enfants. Mais un fait anodin – l’achat d’un Bounty dans une boulangerie – va déclencher dans sa vie une série de catastrophes. Ce misanthrope sûr de ses valeurs et de sa supériorité va rencontrer l’hostilité de ses semblables, découvrir ses faiblesses et ses doutes quant à l’existence qu’il s’est construite. Il perdra sa femme et son travail, sans comprendre ce qui lui arrive. La folle journée de Carton-Mercier, d’humiliations en désastres, est un vrai régal pour l’esprit. Épousant la pensée chaotique du narrateur, souvenirs, hypothèses et inventions diverses bousculent le récit. L’enchaînement inattendu des dialogues et des situations, l’apparition de personnages burlesques font de cette satire sociale le roman le plus drôle et le plus surprenant qui soit. Après le Moral des ménages, salué par la critique et les libraires, Éric Reinhardt poursuit avec brio sa charge incisive contre les valeurs conservatrices et dérisoires qui minent nos sociétés. À travers les mésaventures d’un cadre sup’ absolument détestable, Eric Reinhard signe une décapante satire de la société française conservatrice. Très drôle.