La Faute

Le professeur d’histoire moderne Alfiero Falliverni est-il ou non le redoutable assassin de l’avocate féministe Corinna Lotus Martini, lui qui était son amant ? Leur relation peu conventionnelle pouvait-elle aboutir à un meurtre d’une violence rarement égalée ? Seul à croire à son innocence, son frère Aleardo décide d’oublier leurs différends et tente de tout mettre en ouvre pour faire cesser un tel cauchemar. De sa propre mère à sa femme en passant par son procureur de beau-père, tous semblent pourtant avoir condamné le présumé coupable depuis longtemps. Tous, à l’exception de Maria Anna, une mystérieuse jeune femme susceptible d’avoir eu une liaison avec Corinna, et qui semble détenir des éléments déterminants pour cette affaire. Condamnés d’avance sur l’échiquier d’enjeux qui les dépassent, les protagonistes devront épuiser jusqu’à leur dernier souffle pour voir naître l’espoir de s’en sortir. Un meurtre crapuleux motivé par la haine, des passions nombreuses et contradictoires, un inculpé isolé dans l’obscurité de sa cellule, le quotidien de la prison, des magistrats opportunistes et indolents, un engrenage sans pitié. L’univers de Laura Grimaldi n’a décidément rien perdu de sa noirceur coutumière. En dénonçant les réalités d’une justice expéditive, elle dépasse en outre le strict cadre de la fiction et fait subtilement naître le malaise. Laura Grimaldi a l’habitude des romans qui laissent le lecteur abasourdi, mais fidèle. La Faute en est une époustouflante démonstration. Corinna Lotus Martini, avocate, fut frappée à la nuque puis crucifiée sur un parquet bien ciré. Le cadavre est l’objet d’une mise en scène qui dénote une haine implacable d’origine sexuelle. La police de Milan soupçonne un professeur d’université, trentenaire, milanais, amateur de femmes, toujours vêtu impeccablement. Devant la gravité de l’affaire, le frère aîné du suspect, Aleardo, vient au secours du professeur. Rapidement, l’auteur nous fait pénétrer dans les bureaux du substitut Rosalino Delli Veneri, magistrat impulsif et complexe, et de Casimiro Lo Popolo, procureur d’une rare maîtrise de soi. Nous sommes au début de l’été, et une chaleur étouffante persiste sur Milan, rendant nerveux les juges, les avocats, les policiers. … Grande analyse psychologique, oeuvre morale foisonnante, nuancée, ce “polar” rédigé dans une langue classique est admirablement traduit. Nous sommes devant une oeuvre débarrassée de pathos et d’effets faciles qui éclaire les mobiles profonds des êtres. Du grand art classique européen. Le cadavre de Carolina est retrouvé horriblement mutilé et violé, cette avocate féministe aimait les femmes, mais avait un amant. Et c’est lui qui est soupçonné et emprisonné. Au-dehors, son frère est le seul à essayer de l’aider, à croire à son innocence malgré leurs rivalités. Au-dehors, la belle Maria Anna envoie des messages que personne ne comprend. Les enquêteurs veulent condamner très vite un coupable. Avec le même talent pour le suspens psychologique que dans ses précédents livres, Laura Grimaldi démonte les mécanismes sociaux, les transformations des sentiments et tient le lecteur emprisonné dans son intrigue jusqu’au bout. Qui a dit que les reines du suspens étaient toutes anglo-saxonnes ?