Le Cercle fermé

L’Angleterre de Tony Blair entre dans le nouveau millénaire, et les héros de Bienvenue au club dans l’âge mûr. Vingt ans après, qu’ont-ils fait de leurs idéaux de jeunesse ? N’auraient-ils d’autre choix qu’entre compromissions et immobilisme ? Seul l’affreux Paul, leur cadet, un politicien opportuniste, semble s’adapter à ces temps nouveaux et aux nouveaux cercles du pouvoir. Mais si les utopies des années soixante-dix semblent maintenant lointaines, il suffit de bien peu pour faire resurgir les fantômes du passé… Jusqu’à ce que le cercle se referme. Tout en déroulant la chronique de l’histoire immédiate, du choc de la mondialisation à la guerre en Irak, Jonathan Coe fait le portrait d’une génération en proie à d’irréductibles contradictions. Impitoyable satiriste, il brosse un tableau ravageur de l’Angleterre de Tony Blair, qu’il dénonce avec la fureur vengeresse jadis réservée au thatchérisme. Ce roman est celui d’un conteur à l’habileté diabolique. D’une lucidité aussi réjouissante qu’inconfortable, il se fait le miroir non seulement d’un pays, mais d’une époque tout entière. Et le diptyque que composent Bienvenue au club et Le cercle fermé constitue une fresque aussi ambitieuse et aussi aboutie que Testament à l’anglaise. Les personnages de Bienvenue au club sont devenus des quadragénaires globalement embourgeoisés, dévorés par les ambitions, les leurs, plutôt que par leurs idéaux de jadis… Nous les retrouvons dans l’Angleterre travailliste de Tony Blair, branchée et cosmopolite, société championne du monde des services après que Margaret Thatcher a fait le sale travail en laminant l’industrie lourde, quitte à sacrifier une génération de travailleurs de la classe ouvrière… Au cours de cette période 1999-2003, la politique travailliste semble s’apparenter à une vaste arnaque, et l’ouverture de « tous » à la vie de la société britannique traduit au contraire une confiscation du pouvoir par une élite restreinte, « le cercle fermé »… Un petit chef-d’œuvre de la satire sociale, dans la grande tradition des plumes corrosives britanniques, qui livre une vision bien noire du monde adulte, caractérisé par l’ambition et la soif de pouvoirs dérisoires. Un livre, aussi et surtout, où l’on rit beaucoup, au-delà de l’amertume qui en a certainement inspiré la rédaction.