Le Parc-aux-Cerfs

A l’aube de son règne, Louis XV est un roi bien-aimé. À sa fin, il est détesté. Que s’est-il passé pour qu’un souverain adoré finisse par être tant haï ? Confident et ami des dames de la cour, Bastien Delorme est le chroniqueur de ce règne marqué par les Lumières et la frivolité. Avec la France entière, il s’enflamme pour Y Encyclopédie de Diderot et d’Alembert. Comme elle, il s’indigne contre ce souverain qui collectionne maîtresses et favorites : les «petites sultanes», entretenues dans la résidence du Parc-aux-Cerfs, incarnent la décadence du régime ; Jeanne Poisson, passée à la postérité sous le nom de Mme de Pompadour, se pique de politique et irrite la noblesse autant que la roture ; Jeanne Bécu, ancienne prostituée devenue comtesse du Barry, provoque une haine féroce. En élevant la débauche au rang d’art, en bafouant les espoirs de la nation, Louis XV amorce une révolte qui deviendra, quelques années plus tard, la Révolution. Tous les grands succès de Michel Peyramaure sont chez Pocket Texte intégral Extrait du livre : A ceux qui jugeraient, à la lecture des premières pages de ce récit, qu’en quittant ma famille j’ai accompli une action répréhensible, je répondrai que de bonnes raisons m’y avaient incité. Réponse banale, certes, mais, après tout, chacun, lorsqu’il le peut, mène sa vie à sa guise. Pour ma part, j’estime que, même dans mon adolescence, ce temps de ma vie où j’ai abandonné les miens, je n’étais pas pétri de cette argile qu’on laisse à d’autres que soi le soin de modeler. J’avais, de plus, en moi, une sagesse congénitale qui me permettait une juste appréciation des écueils, des remous et des ressacs dans la voie où j’avais décidé de m’engager. Aujourd’hui, alors que mon existence touche à son terme, je n’ai pas lieu de regretter cette décision, pas plus que de m’en flatter, car, par sa soudaineté et sa brutalité, elle faillit acculer ma famille à la misère. Cette idée de voler de mes propres ailes relève d’un coup de coeur allié à une intention mûrement délibérée. Aucune mésentente ne m’opposait aux miens, je n’avais commis aucun forfait susceptible de me créer des traverses, si bien qu’en apparence rien ne justifiait ce qu’il faut bien appeler une, fuite. J’avais depuis quelques années l’esprit porté à l’indépendance et à l’aventure. Ma vie, dans les jardins maraîchers de Suresnes dont nous vivions, était exempte de soucis, mais il y avait cette fenêtre, puis cette porte ouvertes qui semblaient m’aspirer. C’est ainsi qu’un beau jour je pris la clé des champs.