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Tigre en papier

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Martin, le narrateur, roule sur le périphérique parisien, roule et roule encore, au rythme de la signalétique qui scintille et des enseignes lumineuses qui défilent : une image de notre présent historique, qui tourne en boucle, marchand, phosphorescent, vide. Pendant que sa DS Remember roule et roule encore, le narrateur raconte à la fille d’un ami disparu, surnommé Treize, sa vie et celle de ses amis gauchistes à la fin des années soixante. La jeune femme est aujourd’hui âgée de 24 ans. Elle ignore tout, ou presque, de ce temps-là. C’est une fille d’aujourd’hui. Il est un homme d’hier, rejeton romantique d’une génération en quête d’histoire, après les heures sombres vécues par la France sous Vichy puis lors de la débâcle vietnamienne, synonyme pour lui de la mort de son père, lieutenant du corps expéditionnaire français, sur le Mékong. Une génération qui aurait aimé réécrire ce qu’elle n’a pas connu. Une génération, surtout, qui n’a vu de la Deuxième Guerre mondiale que ses décombres : « C’est de là, de ce désastre énorme que tu viens, mon bonhomme : sans en avoir été. Ta génération est née d’un événement qu’elle n’a pas connu. » Alors il y a eu la Cause du peuple, la Théorie, les bagarres contre les fascistes, le dégoût de la bourgeoisie sous la présidence de Pompidou, le dégoût, aussi, du Beau, l’attirance pour un prolétariat dont ces jeunes gens n’étaient pas, les cocktails Molotov, la fascination pour le cadavre de Rosa Luxemburg et du Che – ces icônes de l’absolu révolutionnaire -, le modèle de la révolution culturelle chinoise, dont ils ignoraient les arcanes sordides. Et puis surtout, l’amitié. Celle de copains aux surnoms improbables, comme Momo-Mange-Serrures ou Reureu l’Hirsute. Que sont-ils devenus ? Bistrotier, éditeur, conseiller politique embourgeoisé, critique littéraire mondain. Des corps avachis, des fantômes… Et puis encore, au-delà de l’amitié, l’amour. L’amour et le corps de Chloé, dont le sexe-serrure faisait plus peur que la possibilité de mourir pour la Révolution mondiale. Voilà. Une jeunesse. Une traversée du temps. Comme celle opérée par Proust – littérairement, c’est là l’essentiel – dans son célèbre bal des morts chez le prince de Guermantes. Sauf que nous avons changé d’époque et qu’à présent, alors que le narrateur parle à la fille de Treize, défile « EDF GDF SNECMA France TELEVISION TF1 miroiteries bâbord-tribord SABLIERES MORILLON-CORVOL trémies trains de barges chargées de nuit ROUEN PORTE DE SAINT-CLOUD N10 BOULOGNE 100 M les HBM en briques du quai du Point-du-Jour. » Poétique des années 60. Ainsi Olivier Rolin aurait pu signer également son livre Tigre en papier. Des années 60, avec tout ce qu’elles possédaient pour rugir et mordre dans la vie. Né entre la mère des défaites et Diên Biên Phu, le narrateur s’emploie à raconter sa jeunesse en roulant frénétiquement le long du périphérique parisien. Une jeunesse qui voit se déployer portraits, objets et gestuel. C’est le temps des copains, des clampins sympathiques “à la vie à la mort”, des virées ici et là, où l’on fauche une bagnole à Vesoul, gravit la tour sud de Saint-Sulpice, où l’on file en voyage jusqu’au Mékong, le temps des Trabants, des cuites, de la Gitane maïs, des tracts qui n’en finissent plus, rédigés dans la nuit et ronéotypés, des réunions politiques, d’Eddy Merckx, de Nixon, et de Sartre houspillé chez Renault… Olivier Rolin aurait pu lasser son lecteur moderne. Du tout ! En même temps qu’il relate une époque révolue, s’adressant à la fille d’un ami disparu lui aussi, corps et âme, il accroche son lecteur (et son interlocutrice) en exacerbant les marques du présent : vastes publicités et calicots le long du périphérique et des passerelles d’autoroute, outrances et dérives de la consommation, vache folle, Zénith et Stade de France… Uni en seul discours aux allures de logorrhée nostalgique (contre un temps “devenu plus hygiénique”), c’est là tout bonnement un pan de l’histoire sociale que livre Olivier Rolin. Avec beaucoup de fraîcheur. –Céline Darner C’est l’histoire d’un type qui raconte à la fille de son meilleur ami, mort depuis longtemps, ce que fut leur jeunesse à l’époque presque fabuleuse – la fin des années 60 – où l’on croyait dur comme fer à la Révolution. Internet n’existait pas, ni le TGV ni les portables ni le câble ni les walkman ni les répondeurs. Les pavillons de Baltard ouvraient encore leurs parapluies au-dessus du ventre de Paris, la télé était en noir et blanc, le président Pompe allait succéder à de Gaulle. Au Vietnam la ” guerre du peuple ” défaisait la puissance américaine, les impérialistes étaient des tigres en papier, la Chine était rouge pour l’éternité, le Che plus grand mort que vivant. L’Internationale serait le genre humain. C’était dans la nuit des temps… Voici donc la vie très horrifique de Martin et de son ami Treize, et du reste de la bande, Fichaoui-dit-Julot, Reureu l’Hirsute, Momo-Mange-serrures, Judith et Chloé, Roger le Belge, tous les autres, les saints et les balances, les castagneurs et les pleutres, les rebelles et les fayots, avec leurs faits et prouesses épouvantables… Il y a dans cette histoire du grotesque mais aussi de la poésie brute, la bêtise y côtoie beaucoup de romantisme, on peut appeler ça comme ça. La scène, le récit, se passe la nuit, dans une voiture qui tourne inlassablement sur les périphs, comme une navette spatiale satellisée autour de Paris. Moteur ! Sur le déni du “je” dans la lutte révolutionnaire et, à l’inverse, sur son culte délirant aujourd’hui, Rolin écrit des pages absolument vibrantes. “Tigre en papier” ne parle dans le fond que de ça : du conflit, de la lutte parfois irréconciliable entre l’individu et les masses, entre l’esthétique et le politique … Les causes perdues et les vaincus sont à l’honneur dans ce que l’on jugera volontiers comme une riposte (désespérée ?) à la dictature du cynisme ambiant. On aurait envie de louer encore la mélancolie tenace de l’entreprise, son humour décapant (“il y avait (…) l’idée qu’un riche est nécessairement gros, et vieux, ou en tout cas pas jeune”). De développer tout ce qui est dit sur la filiation. De citer ses passages magnifiques sur Paris, les gares, la nuit, mais aussi le Vietnam. On n’en finirait pas, preuve s’il en fallait du foisonnement de ce bouquin. Dans la nuit sans étoiles du périphérique parisien, une DS verte n´en finit plus de tourner. Au volant, Martin, quinquagénaire, raconte à la fille d´un ami défunt leur jeunesse militante dans les années soixante. L´ancien maoïste, désabusé et nostalgique, retrace les années d´espérance, de flamboiement, les nuits blanches et les heurts de cette jeunesse enthousiaste qui croyait pouvoir apprivoiser le monde.

Disponibilité : 2 en stock

ISBN 13 : 9782020375061

ISNB 10 : 2020375060

Nombre de pages : 272

Éditeur : Seuil

État du livre : bon état

Reliure : broché

Poids : 280 gr

Largeur : 14 cm

Longueur : 20.5 cm

Épaisseur : 1.8 cm

Auteur : Olivier Rolin

L’édition livrée peut éventuellement différer de celle commandée.

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