Kraa, tome 2 : L’ombre de l’aigle

L’aigle Kraa et Yuma le jeune indien ont définitivement scellés leurs destins dans la Vallée perdue du Grand Nord. Les nouveaux conquistadors “civilisés” vont bientôt réinvestir leur Eden pour mieux y prolonger une nouvelle ville-champignon. Les ressources naturelles délirantes de ce nouvel Eldorado septentrional attisent les convoitises et la violence, qui ne va pas tarder à se déchaîner dans la vallée. Les outlaws tombant sur ce Grand Nord vont cependant rapidement entrevoir à leurs dépens ce qu’il coûte d’éventrer la nature qui les entoure. Benoit Sokal continue d’imprimer de son implacable mécanique sa série Kraa, parfaitement lancée par un premier volume et ici prolongée par un album particulièrement réussi. Le classicisme de l’auteur fait merveille : trait précis, découpage au cordeau, couleurs alternant oppression forestière et oxygène des hauteurs, sens implacable de la construction scénaristique… On sort béat devant tant de maitrise et de suspens silencieusement distillés. Une très belle série sur les rapports entre homme et nature, dont le dénouement est fortement attendu. C’est une vallée très reculée, quelque part au fin fond d’un pays froid qui pourrait être l’Alaska ou la Sibérie. Presque personne n’y vit, hormis la faune sauvage et un peuple autochtone discret. Hélas, le sous-sol regorge de matières premières et bientôt les affairistes déferlent, pressés d’y construire une ville, des mines, un barrage… Les premières exactions surviennent ; personne ne doit faire obstacle au « progrès ». Mais il y a pourtant un témoin silencieux à cet immense désordre : Kraa, un jeune aigle très puissant qui a appris la survie, maître secret de la vallée. Avec Yuma, un adolescent indien dont on vient de massacrer la famille, et avec lequel il a développé un lien d’essence chamanique, Kraa, dont la voix off sert de fil rouge au récit, entre en résistance… Le deuxième volet de la fresque sauvage et sombre signée Benoît Sokal, qui signe son grand retour à la bande dessinée réaliste.